En me lançant à mon compte en photographie à 19 ans, je ne le faisais pas parce que je visais d’être entrepreneure. Les médias sociaux n’étaient pas aussi présents qu’aujourd’hui, les entrepreneurs n’étaient pas les nouveaux gourous des temps modernes et aucun influenceur ne me promettait 100 000$ en 5 paiements faciles d’un abonnement mensuel. Je le faisais par passion, mais surtout par obligation. Ce sideline, ajouté à un stage de graphisme en fonction publique, était en réalité la seule et unique manière de me sortir la tête de l’eau. Je venais de terminer mon Cégep sans un sous, je débutais mon baccalauréat sur les prêts étudiants, emménageais en appartement avec mon chum pour y stationner mon premier véhicule acheté à rabais (merci belle-maman). Je ne rêvais pas de voyage et d’être millionnaire, je voulais manger, m’habiller et avoir un toit sur la tête… La grosse base!
Née pour un petit pain
Le rêve entrepreneurial n’était pas du tout mon projet de vie, je ne connaissais pas vraiment d’entrepreneurs et je venais de la classe ouvrière. J’étais même la première de ma famille à mettre un pied dans une université. Le petit pain qui m’attendait était probablement de rembourser mes dettes, vivre avec un salaire moyen, aller quelques jours en juillet à Old Orchard et espérer être heureuse avant de mourir (merci les cowboys). Ce revenu d’appoint visait à me faire bénéficier d’un niveau de vie plus intéressant… ou moins catastrophique! Une manière de ne pas vivre de paie en paie.
De la fonction publique à l’entrepreneuriat
Initialement, à la fin de mes études, ce projet d’être photographe professionnelle devait s’éteindre et j’étais censée regagner les rangs de la vie de designer graphique fonctionnaire. Le temps de rembourser mes prêts, d’avoir une stabilité financière et de pouvoir avoir un poste permanent. En quelques mois, la vie m’avait mené complètement ailleurs. Jeune entrepreneure forcée, j’ai découvert rapidement les avantages que ce type de carrière pouvait m’apporter. Bien que les responsabilités étaient grandes et que je ne menais pas la même vie relaxe que mes amis, mon amour de l’entrepreneuriat était là. Même si je ne savais même pas encore que c’était de l’entrepreneuriat. J’aimais diriger ma carrière, mon horaire, teinter mon entreprise de ma personnalité et créer un mouvement reflétant mes désirs profonds. J’avais l’impression de suivre une vocation où la liberté était ma seule possibilité.
Des dettes étudiantes à la vie de maman
À 22 ans, terminant mes études universitaires, j’ai réalisé qu’être photographe professionnelle était plaisant, mais aussi payant. Alors que je le faisais que pour payer mon épicerie, je me suis plutôt retrouvée en posture d’acheter une première maison et d’avoir un premier enfant l’année suivante. Le salaire qu’on me promettait d’espérer si je «toffais» 15 ans en fonction publique était celui que je frôlais déjà. Surtout, je commençais déjà à ronger les murs de mon cubicule beige au ministère de l’innovation qui faisait tout sauf innover. Je me voyais voguer de burn-out en burn-out si je choisisses cette vie.
Entrepreneure, mais pas jetset!
La réalité, c’est que cette période de rêve entrepreneurial était tout sauf jetset. J’ai voyagé très peu, j’ai travaillé parfois 7 jours sur 7. Je terminais au gouvernement et j’enchaînais en soirée avec une séance photo. Je faisais parfois de la retouche entre 22h00 et 2h00 du matin. Je me relevais à 5h30 pour répondre aux clients et me rendre à l’université. Ma santé mentale était dégueulasse, l’anxiété me rongeait, le manque de sommeil était palpable, l’apprentissage et la gestion d’une jeune entreprise difficile. Je jonglais entre l’université, 2 jobs, les dettes et les finances. J’ai littéralement tout donner pour pouvoir espérer respirer. À aucun moment, j’ai cru que cette vie était luxueuse.
Alors, maintenant, quand je rencontre un nouvel «entrepreneur» à titre de consultante marketing & affaires qui me parle de son rêve entrepreneurial en mentionnant uniquement le salaire et les conditions… Je passe et je préfère accompagner une startup avec une équipe motivée et le front bien suant.
Pourquoi? Parce que je sais que sans effort, responsabilité et temps, l’entreprise ne voit pas le jour… Elle meurt!