M’offrir un poste de directrice marketing au sein de leur entreprise se voulait une fleur ou un gage de confiance de la part de mes clients, mais moi je ne pouvais m’empêcher de voir une cage dorée ou une main mise sur ma carrière. Dans les dernières années, cette situation est arrivée à plusieurs reprises et je dois l’avouer, elle m’a complètement refroidie. J’ai pris du temps avant d’en parler et de comprendre pourquoi je réagissais aussi fortement au point de fuir. Je me suis remise en questions et j’ai parfois été jugée par des proches qui ne comprenaient pas mes réactions. Alors, pourquoi est-ce que cette fleur semblait empoisonnée à mes yeux?
Femme d’affaires avant tout
Étant entrepreneure depuis près de 15 ans et ayant toujours été très indépendante en affaires, je n’ai jamais envisagé sérieusement de me trouver un emploi ou de quitter l’entrepreneuriat. Depuis mes 20 ans, je n’ai littéralement pas été l’employée d’une entreprise. Même pendant la pandémie où tout allait tout croche, qu’il aurait été plus facile de faire le saut, je me suis accrochée à ce mode de vie que j’ai toujours adoré. Ma liberté professionnelle est ma plus grande richesse et mon sens des affaires une arme pour planifier mon avenir, même quand tout s’écroule. Je pense bien humblement atteindre les objectifs que je me fixe tout en ayant une vision juste du marché dans lequel mes clients évoluent. J’ai lancé mon entreprise à 19 ans en venant d’une famille de classe ouvrière de Limoilou et je l’ai fait croître tous les ans depuis, avec détermination. J’ai vu mon chiffre d’affaires doubler, tripler, quadrupler… Mes projets grandir et gagner en importance. J’ai des expériences de vie et des qualités que plusieurs entrepreneurs n’auront probablement jamais parce que j’ai commencé au plus bas de l’échelle et que je n’ai jamais sauté d’étapes. On ne peut ainsi plus sortir la femme d’affaires de mon corps puisqu’elle en fait entièrement partie.
Direction marketing: la peur de la cage dorée
Je sais pertinemment que personne ne m’a offert de poste de direction pour les mauvaises raisons. On l’a toujours fait par confiance, parce que j’avais les capacités, les compétences et la drive pour le faire. Parce qu’on croyait en moi et que j’avais prouvé ma valeur. Pourtant, à chaque fois, j’ai instantanément ressenti qu’on voulait m’enfermer dans une cage dorée et je me suis littéralement sauvée d’entreprises que j’adorais pourtant. De gens que j’estimais beaucoup. D’actionnaires que j’appréciais et avec qui la communication était si facile et agréable. Ce qui était une offre en or pour plusieurs professionnels était ma hantise, ma panique et ma plus grande peur… Pourquoi est-ce que je réagissais ainsi, comme un animal effrayé?
Avoir peur de mettre tous mes oeufs dans le même panier
J’ai pris des mois à me questionner sur ma réaction, à mon état mental, à ce qui générait chez moi une si vive réaction d’opposition. À tenter de comprendre pourquoi je ne voulais pas qu’on pense que j’aspirais à ça et que je ne voulais pas qu’être ça justement. À pourquoi ça me faisait mal de penser que je n’avais pas été prise en considération à titre d’entrepreneure à qui on offrirait généralement plutôt d’intégrer l’actionnariat d’une entreprise. Je me suis même demandée si j’avais été un homme, est-ce que ça aurait été différent? Parce qu’accepter un poste de direction, pour moi, sans implication additionnelle, serait m’abaisser à ne pas reconnaître mon expérience d’entrepreneure efficace. Ce serait renoncer à ma liberté, à mes 1001 projets, à mon indépendance, à ma capacité de créer et de bâtir pour suivre des directives sans réelle possession sur l’entreprise. Et, honnêtement, cela reviendrait à me contenter d’une part limitée du gâteau, alors que je suis habituée de le cuisiner de A à Z, puis d’en distribuer les parts en m’assurant d’y trouver mon compte. Je me sentais comme une femme d’affaires à qui on proposerait de devenir femme au foyer du jour au lendemain. Un poste, un seul. C’était ça pour moi, être sous l’emprise entière et dépendante d’autrui… un danger!
Respect aux directions marketing
Être directrice marketing d’une entreprise, c’est un rôle prestigieux pour beaucoup et plusieurs professionnelles le font excessivement bien. Dans mon parcours de consultante, je croise une foule de directeurs et directrices marketing compétents, satisfaits, heureux de leur vie et avec qui j’ai de bons rapports. Je n’ai pas de jugement envers ceux et celles qui se réalisent pleinement dans ce rôle, car ceux-ci sont primordiaux pour bien des entreprises. Pour moi, avec mon expérience et ma manière de travailler, c’est plutôt une prison qui m’empêcherait de continuer de collaborer avec plusieurs entreprises comme je le fais actuellement. L’entrepreneure en moi ne se satisfait pas d’un cadre, d’un seul endroit et même si ce cadre est luxueux, vient avec des avantages sociaux et un salaire élevé. Je suis faite pour décider, bâtir, choisir et créer plusieurs projets, mais aussi pour participer activement à la construction de ma vie professionnelle. Je ne suis tout simplement pas capable d’avoir un boss… Je veux collaborer d’égal à égal, être complémentaire à des personnalités inversées à la mienne.
J’ai trop «faim» pour un poste de direction
Ce n’est pas une question de snobisme, mais de réalité. J’ai trop «faim» pour atterrir à un poste de direction sans aspirer à vouloir m’arrêter à ça. C’est dans ma nature. Diriger une équipe ou une stratégie, c’est une chose. Mais en tant qu’entrepreneure, je veux plus que ça: je veux participer à la vision globale, à la stratégie à long terme, et surtout, récolter les fruits de ma créativité et de mon travail. Parce qu’après tout, j’ai cette capacité à m’investir à fond et je souhaite participer aux bénéfices, aux décisions cruciales, aux virages stratégiques et à la renommée de ce que j’aide à bâtir. Peut-être qu’un jour, j’en aurai assez de l’entrepreneuriat et que je voudrai aller m’asseoir dans un poste stable et sécuritaire… qui sait? Toutefois, pour le moment, je m’amuse trop pour m’y limiter. C’est simple, je veux être aux commandes du bateau et non seulement ramer.
Alors, à ceux qui voient en moi une potentielle directrice marketing, je vous le dis avec toute la gratitude et mon affection possible: merci, mais non merci. Si vous m’appréciez à ce point, offrez-moi plutôt d’intégrer les têtes dirigeantes ou de créer et investir dans votre prochaine entreprise à vos côtés. Je ne veux simplement pas faire partie uniquement de votre organigramme!